La musique d’abord
En 2008, nous célébrions avec Bernard Coutaz, fondateur d’harmonia mundi, cinquante ans d’exploration musicale. Il s’était alors pris au jeu des interviews, avait raconté l’histoire du label, ses débuts à l’assaut des orgues historiques, le ‘kidnapping’ d’Alfred Deller par une belle soirée de juillet 1970, le rôle d’harmonia dans la révolution portée par les « baroqueux » et le développement international qui avait suivi au point de valoir à harmonia mundi, plusieurs fois depuis le début des années 2000, un titre mondial de « label de l’année » : 2005 (Gramophone), 2017 (Classica), 2018 (Gramophone encore), 2021 (Classica encore !).
Les années 1990-2000 furent également marquées par l’émergence d’un réseau de distribution internationale réputé et par un maillage territorial très visible à l’heure du CD ; entre la disparation de Bernard Coutaz en 2010 et celle de son épouse Eva Coutaz en 2021, s’est produit un bouleversement sans précédent du paysage discographique, conduisant le plus souvent à des restructurations-fusions fatales aux labels indépendants.
Il se trouve qu’en rejoignant à l’automne 2015 le groupe [PIAS], fondé par Kenneth Gates et Michel Lambot, harmonia mundi a non seulement rallié l’une des compagnies emblématiques de la communauté « indie », elle a pu aussi se recentrer sur son identité première : la production musicale. La ligne éditoriale du label, toute en exigence, s’est adaptée avec succès aux rouages d’une nouvelle économie de la musique. Loin de s’étioler, le roster s’est considérablement renforcé avec l’arrivée d’acteurs majeurs de la musique classique, pianistes, chanteurs, instrumentistes, chefs d’orchestre, ensembles…
De la musique d’abord ! disait harmonia mundi en 1977 ; Music first ! clamait [PIAS] en 1984… sans pouvoir imaginer alors que 40 ans plus tard, deux acteurs indépendants… majeurs se retrouveraient unis à Arles, à l’emplacement d’un ancien monastère fondé au VIe siècle par l’évêque Césaire.